De l’utilité des gratouillis de poule naine en pédo

Un ami, Laurent L. pour ne pas le nommer, se moque fréquemment de mes petits bouts de fosse et de mon piochon de XXX qui me sert à les creuser ; il qualifie ces travaux de gratouillis de poule naine, en comparaison des sondages à la pioche de 2m de profondeur qu’il est capable de réaliser en 3 minutes à peine. Certes, certes… Néanmoins, ces petits gratouillis, même s’ils ont la dimension d’une grattée de rat cherchant une truffe, permettent d’accéder à de nombreuses informations et il serait stupide de les négliger ! Une poule naine a donc gratouillé lors d’un récent passage à Rabat, dans une cédraie proche d’Ifrane. Le contexte est original puisque des lentilles de basalte recouvrent des calcaires (sans plus de précisions), l’épaisseur de ces lentilles étant localement très faible ; le contact entre les deux formations est parfaitement visible dans le paysage, même sous forêt. (70m à peine séparent les deux photos suivantes).

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                               cédraie sur basalte                                  cédraie sur calcaire

La géomorpho s’approche d’un plateau doucement ondulé entaillé de talwegs étroits. Dans les versants sur formations calcaires, le sol présente une texture sableuse à sablo-limoneuse constante, une structure particulaire, une teinte grise à brun grisâtre. Je ne suis même pas sûr que les horizons soient calcaires, à mon avis on est sans doute plus proche du calcique (?). Rca apparaît vers 20cm de profondeur à peine. L’épisolum humifère associe un A de juxtaposition, et un OH de moins de 1cm : je penche au final pour un hémimoder.

rabat2011_090_mod gratouillis de surface dans le versant calcaire

Dans la zone de versant sur basalte, la couleur des horizons devient rougeâtre, la structure est nettement plus marquée et stable dès la surface, type polyédrique fine, la texture devient LSa puis LAS en profondeur. On observe aussi des agrégats colonisés de mycéliums blancs, participant à la stabilisation et à la compacité de l’horizon 15cm-30cm.

rabat2011_092_mod gratouillis dans le versant sur basalte

rabat2011_091_mod agrégat colonisé par des nappes mycéliennes

L’épisolum varie selon la position par rapport aux troncs des cèdres; Ici, à moins de 3m du tronc, il s’agit d’un dysmoder, les horizons sont en outre très secs.

rabat2011_095_mod

rabat2011_098_mod le gratouillis proche du tronc

Les observations suggèrent des propriétés andiques, mais ce n’est pas très net et je n’y retrouve pas nettement les horizons de référence ; peut-être plutôt s’agit-il plutôt d’un BRUNISOL andique ? En tout cas, les peuplements de ce secteur marquent très fortement la présence des deux formations géologiques,  pour toutes les orientations de versant (nord / sud) ; mais l’épaisseur du basalte semble malgré tout réduite : quel est en conséquence l’environnement physico-chimique réel des racines des cèdres ? calcaire malgré tout ? Les deux photos suivantes illustrent de nouveau cette comparaison entre versants.

rabat2011_101_mod versant sur basalte, on distingue les blocs de basalte en surface

rabat2011_103_mod versant sur calcaire, à 50m environ de la station précédente

 Au minimum, l’intérêt du gratouillis est l’accès à une information sur l’épisolum humifère, ce qui autorise quelques spéculations quant au fonctionnement du sol. Je revendique donc le droit de continuer à faire des gratouillis, ce qui m’arrange quant il n’est pas possible de faire passer une pioche dans l’avion sans se faire refouler. Vive le couteau à huîtres !

 

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