Ma tournée de terrain pour le RRP m’a entraîné la semaine dernière à la marge nord-est du Tarn et Garonne : Belmont Ste Foi, Labastide de Penne, Mouillac… Ce territoire s’étend en partie sur une confrontation entre des faciès très différents de roches calcaires et le paysage qui en résulte est très contrasté malgré l’absence de relief.
Sur la photo aérienne ci-dessus (issue du Geoportail), on reconnait à droite les routes de la bordure occidentale du camp militaire de Caylus, Belmont Ste Foi se situant en bas à droite de la photo. Cette vue aérienne permet d’apprécier le contraste qui existe entre un espace agricole ouvert et des espaces de bosquets et de forêts. Lorsque l’on analyse la carte géologique du secteur (issue du site Infoterre), deux ensembles géologiques se confrontent.
D’une part des formations calcaires et bréchiques de l’Oxfordien en bleu et bleu-vert, d’autre part des formations marneuses et calcaires crayeuses du Miocène ou des calcaires lacustres de l’Oligocène, en rose et orange. Les capacités d’altération de ces deux ensembles de formation ont conduit à des pédogenèses sensiblement différentes et ont par conséquent produit deux pôles de sols, deux pôles de paysages :
- d’un côté des FERSIALSOLS, sur les calcaires durs jurassiques. Ces sols se caractérisent par une couleur rougeâtre à orangée (5YR au minimum), une structure très stable et très développée, une CEC élevée… La plupart du temps non carbonatés, mais pouvant aussi acquérir un caractère calcique ou calcaire, ils sont donc l’un des faux-amis de la pédologie et la preuve de la disjonction qui existe souvent entre formation calcaire et sol calcaire. Dans ce secteur, la teneur en éléments grossiers est élevée et les sols sont très peu épais à squelettiques (-> FERSIALSOL lithique); ils ne sont en outre pas carbonatés, mais les analyses chimiques ultérieures diront s’ils sont insaturés ou calciques. Un chargement élevé en ovins, par exemple, peut conduire à la formation de zones de sols squelettiques avec affleurements calcaires. Ces sols sont plus le domaine des prairies pâturées, le parcellaire est petit, enclos de murets, les bois et bosquets de chêne rabougris sont fréquents ;
- de l’autre des CALCOSOLS et RENDOSOLS sur formations marneuses et molassiques : pH supérieur à 8, effervescence forte à HCl, teneurs en carbonates totaux et en calcaire actif non nulles, teinte brune, textures argileuses. C’est un secteur de terres labourées propices aux céréales, le parcellaire est plus vaste, les limites parcellaires sont peu marquées et aucun muret ne vient les délimiter.
La photo ci-dessous résume ces deux paysages.
En avant-plan, parcelle récemment labourée : CALCOSOL de formation m1aM ; en arrière-plan, avec une topographie qui s’élève très légèrement, la couverture boisée qui marque les formations jurassiques et leurs FERSIALSOLS lithiques.
Deux photos d’affleurements des formations calcaires et calcaires crayeux m1aM. De véritables paysages de badlands se développent localement, ponctuant le paysage de longues traînées blanchâtres que l’on repère aisément.
Parcelle piétinée par des brebis. Les zones de FERSIALSOL, ici non carbonaté, disparaissent progressivement au profit des pointements et chicots calcaires (avec un faciès dolomitique pour ne rien arranger).
La limite entre les deux ensembles pédopaysagers est très nette ; l’incertitude est de l’ordre d’une cinquantaine de mètres et les couleurs de sols permettent de les repérer sans trop de problème.