Le programme Micosylva+ a été clôturé la semaine dernière, l’occasion de réunir le groupe et les futurs acteurs à Montpellier pour un dernier symposium. Je ne résiste pas à l’envie de parler du petit dernier, le manuel de diagnostic et de gestion mycosylvicole, auquel j’ai pu apporter les éléments relatifs au sol.
La mycosylviculture est une gestion globale qui valorise les fonctions écologiques essentielles des champignons dans l’ecosystème forestier, à l’interface entre les arbres et le sol, qui valorise aussi les synergies entre production de bois, production de champignons comestibles et préservation de la biodiversité et enfin qui valorise la diversité des fonctions forestières et l’équilibre entre ces fonctions. Tout part de l’écologie des champignons sylvestres mycorhiziens et des points communs entre ces espèces : ouverture du milieu, rajeunissement des peuplements, diversité des essences hôtes, importance des litières, nature du sol, effet des plantes associées et de l’histoire des parcelles. C’est de la compréhension de l’écologie de certaines espèces cibles comme les Boletus, que nous sommes parvenus à développer un modèle de gestion mycosylvicole. D’autres confrères du groupe, comme le CTFC de Catalogne, ont plus particulièrement travaillé sur les lactaires ; Ammanita ponderosa a été l’espèce cible choisie par les amis portugais de l’INIAV et de la fac d’Evora.
Le sol est devenu un acteur incontournable de cette gestion ; à tel point que désormais, pour faciliter la transmission des connaissances aux propriétaires forestiers nous préférons souvent commencer par observer une fosse pédo avant d’analyser le peuplement. Et tant pis si cette fosse n’est pas suffisamment profonde ou large, l’important c’est de discuter autour du sol, des racines et des mycorhizes ; après, seulement après, on lève le nez.
Le guide fait d’ailleurs la part belle aux méthodes pratiques centrées autour de l’observation des sols : comment observer, quoi observer, mais aussi comment utiliser des tensiomètres ou comment être critique face à une analyse de sol. Cela permet de mieux ingurgiter la deuxième partie du manuel, destinée à la présentation de la méthode de diagnostic et de gestion. Nous avons identifié 10 facteurs : 5 facteurs de peuplement et 5 facteurs stationnels. Chaque facteur fait l’obet d’une notation qui tient compte de la « prime » à la biodiversité : une note maximale par exemple n’est pas forcément accolée au mode de gestion le plus performant en matière de production, mais le plus équilibré au regard des diverses fonctions de l’écosystème. Le diagramme final qui en résulte permet de comparer les stations entre elles mais aussi d’en déduire des modes de gestion pour améliorer le système : apport de matières organiques, ouverture du peuplement, gestion de la strate herbacée, etc. Bien sûr, toutes les analyses autour du comportement hydrodynamique très spécifique des sols de boletières ont été prises en compte et font l’objet d’une note particulière.
Enfin, nous avons aussi travaillé sur le diagnostic à l’échelle d’un territoire, une méthode qui allie géomatique de haut vol et cartes des sols pour aboutir à un système expert qui permet de tracer des scénarios pour l’avenir. C’est Pyrénées Cartographie qui s’est collé à ce problème et qui l’a résolu comme d’habitude, en courant très vite devant tout le monde.
Le mieux est encore de se procurer ce manuel et de le lire, de l’améliorer, de le compléter. Et de creuser des trous !